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Karen Grigorian, un des derniers maîtres plisseurs de France
Par Tabatha • 23 février 2022 • Partager :
La chute du mur : départ pour la France
Karen Grigorian est arménien. Lorsqu’il habitait encore dans son pays d’origine, il y a passé son brevet et a suivi une formation équivalente à celle de charcutier. Lorsqu’il est arrivé à Paris en 1990 suite à l’effondrement de l’URSS, il est tombé par hasard sur un atelier de plisseur. Karen et son frère sont alors engagés directement et formés dans cet atelier. Alors que Karen va continuer à travailler dans cet atelier, son frère va partir vivre aux États-Unis.
De nombreuses personnes lui ont dit lors de son parcours qu’il n’arriverait jamais à atteindre ses objectifs. Malgré tout, Karen a toujours su se fier à ses intuitions. Tout au long de sa carrière, il va repousser les limites que les autres ont essayé de lui imposer.
La famille est très importante dans la vie de Karen Grigorian. Chaque jour, il honore ses proches et leurs sacrifices faits au nom de l’entreprise. Aujourd’hui, Karen nous confie que son plus grand accomplissement, son œuvre favorite, est la fierté et la reconnaissance des personnes qu’il aime.
Ses grands-parents étant tisserands, il est très touché à l’idée d’avoir encore aujourd’hui exposé dans son atelier, des kilims tissés de leurs propres mains. L’héritage familial est une des valeurs clé de la vie du maître plisseur au point même que ses enfants sont désormais ses associés.
L’art du Pli : un savoir-faire en perdition
La disparition des ateliers
Au moment de l’arrivée de Karen Grigorian en France, Paris et ses environs comptent 100 ateliers de plissage. Dix ans après, le nombre a énormément baissé et la plupart se sont équipés de machines à pli. Entre temps, Karen va poursuivre son apprentissage pendant 13 ans dans cet atelier jusqu’au rachat de celui-ci par Chanel. Gérard Lognon, qui est son mentor depuis ses débuts dans le plissage, va le pousser à créer son atelier. Il est actuellement le dernier maître plisseur de France à n’utiliser aucune machine à plisser dans son atelier.
La création d’un atelier parisien, ça se mérite
Les débuts de l’atelier indépendant de Karen Grigorian vont être plein de rebondissements. La mairie de Paris va, après de nombreux mois de négociations, lui mettre à disposition un local en location afin qu’il puisse exercer son activité.
À l’arrivée de Karen dans son nouveau local, il va tout refaire à l’intérieur, car le lieu n’avait pas été utilisé pendant 13 ans et était devenu insalubre.
Il rénove et crée notamment un incroyable garde-corps fait en métal ouvragé agrémenté de grenades en bois (qui est le symbole de l’Arménie). On peut remarquer certaines créations familiales dont il est très fier qu’il a exposé à côté des siennes.
Karen Grigorian, un ingénieur du pli
Les étuves classiques limitent grandement la créativité de notre artisan. Elles sont trop petites. Karen est contraint par les normes de fabrications industrielles de ces dernières. Il décide alors d’appeler une équipe de soudeurs, qui travaillent normalement sur les navires cargo qui transporte le pétrole.
“On va empiler trois étuves, on va les souder entre elles à l’ancienne, puis brancher sur tout ce bazar une armoire électrique couplée à un circuit fermé de production de vapeur.”
Alexis, qui reformule comme un chartier les mots du maître plisseur.
Cette installation unique au monde permet un réglage extrêmement précis de la température et de la quantité de vapeur utilisée lors de l’étuvage. Cette technologie inventée par Karen Grigorian permet notamment :
- D’éviter une altération des couleurs des tissus,
- D’éviter la fonte des paillettes,
- De réaliser des plis de très grande dimensions
Élaborer cette étuve a été un réel défi, les soudeurs lui répétèrent maintes fois qu’ils ne pouvaient pas garantir le résultat final. “Si l’on essaye rien, il ne vous arrivera jamais rien de bien”. Cette expérience fut un franc succès, tellement inattendu qu’aujourd’hui certaines mauvaises langues doutent encore de l’existence de cette formidable machine.
Une technique unique au monde
L’étuve fait environ 4 m de haut, ce qui est très impressionnant comparativement aux 70 cm des modèles standards. On y installe le tissu à l’intérieur d’un moule en carton, sans aucun ajout de substances, on étuve. Cela fait prendre la forme du moule au tissu. Cette installation permet la création de très grands modèles comme des traînes de robe de mariée d’environ 3m50. La plus grande création qu’il est réalisée est de 5m90 sur 1m60.
Un moule est tout d’abord présenté de manière miniature au client afin d’avoir une meilleure visualisation de l’envie de ce dernier et la correspondance de celui-ci avec ses idées. Une fois le prototype miniature validé, Karen fabrique le moule dans ses dimensions définitives. Le temps de création d’un moule est très variable : de 2 jours à 3 semaines.
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Épisode 11 : Karen Grigorian, un des derniers maîtres plisseurs de France
Nous sommes partis à la rencontre de Karen Grigorian, un des derniers maîtres-plisseurs de France. Dans cet épisode, Karen nous raconte en toute intimité son parcours parsemé d’épreuves et son amour pour son métier.
« Si je ne faisais que du plissé soleil, je gagnerais bien mieux ma vie »
Le plissé soleil est le geste, la technique emblématique de l’art du pli. Karen a énormément de demandes à ce sujet, mais les refuse de plus en plus. Ce geste emblématique fait partie des outils fondamentaux du maître de la rue des Dunes. Il aime ce geste, c’est le premier qu’il se risque à expérimenter. Cependant, Karen Grigorian n’a pas créé son entreprise dans le but de fonder le musée du plissé soleil. Il brûle de passion pour son art, souhaite l’honorer en tant qu’héritage, tout en le nourrissant de nouvelles idées.
Le Pli sans machine, un enfant de la famille Grigorian
Il le fit renaître de ses cendres. Karen Grigorian, depuis les ateliers Lognon, le jour où une commande spéciale arriva, prit l‘initiative avec l’autorisation de son patron de s’essayer au pli manuel. Partant d’un vieux patron de pli soleil usé, il s’entraîna à le reproduire. C’est de cette façon qu’il réalisa son tout premier plissé soleil.
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