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Xavier Forêt : tapissier, créateur et designer
Par Romane • 10 décembre 2021 • Partager :
“Comme tic et tac” cette expression illustre parfaitement la relation entre Xavier Forêt, tapissier et Alexis, gérant de l’agence. Alexis a réalisé un stage chez Xavier lors de ses études et ils ne se sont plus lâchés.
Cet article est assez particulier, car il évoque la vision de Xavier et d’Alexis sur plusieurs sujets de l’artisanat. Rien de mieux pour comprendre ce domaine en profondeur.
Patrimoine et héritage
La notion de patrimoine et d’héritage est très ancrée dans notre histoire. Pendant longtemps, il était courant de construire une bâtisse en pierres dans le but de la transmettre en héritage à ses enfants.
La pierre est un matériau qui dure dans le temps : les générations précédentes se préoccupaient de la durabilité au cours des années. Il semble qu’il y ait de moins en moins la notion d’ancrage chez les jeunes générations.
Le nouveau modèle familial apparaît plus détaché de l’objet foyer. La démocratisation du béton au début du XXe siècle a éclipsé les vieux principes de construction (bois et pierre) au cours du temps. Ce changement d’écosystème a entraîné la chute significative du nombre d’artisans qualifiés à travailler les structures de pierres et de bois. Aujourd’hui, notamment pour la pierre, il peut être très compliqué de trouver un artisan tailleur de pierre qualifié à des prix abordables par le grand public.
Ce changement est également dû à l’évolution de la manière d’administrer ses revenus. Du point de vue de Xavier : aujourd’hui, le pouvoir d’achat moyen n’a pas diminué ou augmenté outre mesure. Selon lui, le changement s’articule autour de la part de budget consacré aux plaisirs.
Technologie et artisanat : deux antipodes ?
Certaines marques ont essayé de combiner artisanat et technologie : Patek Philippe qui a tenté de créer une montre connectée, projet qui n’aura finalement pas abouti, car nouvelles technologies et luxe cohabitent difficilement.
Pourquoi les grandes maisons horlogères ont pris le parti de ne pas intégrer de composants électroniques dans leurs produits ?
Les nouvelles technologies évoluent si vite qu’il est impensable d’acheter une montre à 80 000 € qui ne sera plus utilisable d’un point de vue logiciel au bout de quelques années. Un iPhone ne dure que 2 ou 3 ans alors qu’un Patek Philippe Nautilus bien entretenu pourra se léguer sous plusieurs générations.
On peut dire que nouvelles technologies et artisanat sont en opposition de par leur rapport au temps. L’électronique évolue chaque jour et devient par nature obsolète lorsqu’une nouvelle version d’un même produit est commercialisée. L’objectif de l’artisanat est de traverser le temps. Il repose sur des valeurs d’héritage et de savoir-faire manuels.
Pour autant, les nouvelles technologies ne sont pas à bannir du processus de création et de conception : par exemple, les métiers à tisser sont de plus en plus sophistiqués. L’automatisation de ces derniers permet de repousser les limites techniques de l’être humain et nous donne à voir des réalisations de plus en plus impressionnantes.
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Épisode 5 : Xavier Forêt : tapissier, créateur et designer
La passion, l’envie de transmettre et un peu (beaucoup) de folie sont les maîtres mots de cet épisode au côté de Xavier.
Réel besoin client
La rencontre entre l’idée client et le professionnel peut parfois être difficile.
Beaucoup de professionnels sont piégés dans l’écoute de leurs clients. Ils se soumettent aux envies du maître d’ouvrage en oubliant d’exercer leur compétence la plus importante : le conseil du sachant. Le rôle premier d’un professionnel est de proposer une expertise et d’enrichir un projet par son savoir-faire.
Les réseaux sociaux comme Instagram et Pinterest donnent accès à énormément de contenus visuels rehaussés de l’opinion de divers blogueurs. Cette surcharge d’informations est challengeante pour le professionnel qui rencontre des clients de plus en plus éduqués. Sa mission n’est plus seulement la conception, mais l’écoute active du discours de son interlocuteur afin de comprendre les ambitions cachées derrière lui.
Pour donner un exemple parlant, il arrive régulièrement à Alexis qu’on lui demande la mise en œuvre d’une verrière. Le nouveau rôle du designer à cet instant est de comprendre quel est le réel besoin derrière cette volonté : plus de lumière ? Plus de transparence ? L’envie d’une esthétique industrielle ? Pouvoir séparer sans fermer ?
Du point de vue de Xavier, il est dommage qu’un lieu avec une fonction précise comme des bureaux ne puissent pas être réhabilité pour proposer un nouvel usage. Il existe beaucoup de lieux hybrides qui exécutent plusieurs destinations. D’après lui, vouloir faire plusieurs choses en même temps et l’assurance de mal réaliser chaque tâche.
“Le canapé-lit, c’est le moins bon des canapés et le moins bon des lits”
Matériau parfait ou imparfait
Chaque matériau possède ses qualités et ses défauts. Par exemple, un tapis peut être un inconvénient lors d’un apéritif, car embêtant à nettoyer, mais peut être un avantage en hiver quand il fait froid.
Un matériau c’est comme une colocation, il faut apprendre à vivre ensemble.
Anecdote
Il a une quinzaine d’années, Xavier s’est acheté sa première paire de chaussures Heschung. Ces chaussures représentaient un tiers de son salaire. Xavier a beaucoup réfléchi avant de les offrir. Cet achat a été décisif dans sa vie : il a rompu avec la chaussure de consommation standard jetable au profit d’une chaussure d’artisan de qualité et faite pour durer dans le temps.
Un jour, il fait une mauvaise manipulation lorsqu’il s’arrête à vélo et son talon frôle la pédale. Résultat, la chaussure se retrouve griffée sur le talon, à peine un mois après les avoir achetés.
Passé le sentiment de frustration initial, Xavier a choisi de voir le bon côté de cet incident “Une chaussure ça vit, ça s’utilise et ça se patine avec le temps. C’est ce qui fait son histoire.”
Enseignement
Xavier met un point d’honneur à l’enseignement de l’artisanat. Pour lui, il est essentiel que les professionnels d’un corps de métier enseignent et transmettent leurs techniques à de nouveaux apprentis.
L’exercice de cette tradition permet de faire vivre des savoir-faire parfois séculaires et donne à voir au monde des objets de caractères. L’industrialisation a conditionné le consommateur à nouer une relation avec des choses lisses et “parfaites”. L’artisanat est souvent perçu comme une dynamique très onéreuse : il est très rare d’observer la commande d’un canapé fait sur-mesure. Or, la personnalisation qu’induit cette démarche n’est pas nécessairement plus coûteuse que l’achat d’un canapé de grande marque aux formes et au touché standardisés.
L’enseignement des métiers faisant appel à l’artisanat comme l’architecture souffre d’un manque de dialogue avec l’artisanat.
Durant l’antiquité romaine, les architectes devaient passer plusieurs années de leur vie à pratiquer les métiers des artisans afin d’obtenir leur titre. Pouvoir comprendre les tenants et aboutissants des métiers de l’artisanat est essentiel afin de bien concevoir.
Xavier se dit parfois qu’il aurait aimé créer sa société plus jeune. Cependant, les dix années de pratique avant de créer son entreprise étaient essentielles pour acquérir l’expertise qu’il possède aujourd’hui. Elles ont été importantes pour comprendre tous les acteurs de l’écosystème dans lequel il travaille.
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Il est facile de savoir si un objet est beau ou non. Si cet objet nous plaît. Les magazines sont remplis de belles images d’appartements et de villas tous plus sublimes les uns que les autres. La plupart vous seraient invivables.
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